dimanche 5 octobre 2008

Tentatives d'infinistère


à partir
de l’oubli
voici une mémoire neuve un feu
vient d’y reprendre
dans les genêts
dans la bruyère on monte brume
on descend nuit dans les sourires
l’un de l’autre on se prend
par la main à rêver
qu’on marche tout le monde dans le noir
pas pour pas
se perdre mais se perdre
encore
à deux
se perdre à tâtons

on fait reconnaissance

***

voici une main sur fond de mer l’autre
dans les fougères les genêts dans les gestes
qui prennent feu de maintenant nous ici
nous voici tellement nous qu’on s’étonne qu’on vit
une main dans le présent l’air froid l’autre
vers le souvenir on s’accroche aux racines
un seul geste déjà dans demain matin
et pour toujours demeure cette photographie la vie
en couleurs les couleurs avec nous vont
vieillir elles viennent
du passé avec nous déjà
elles passent

***

le monde est grand une pointe
de granit dans le vert le vent le soir
tombe à point
nommé
comme une pointe
de couteau
suffit dans la cuisine oui
à tout partager
le monde est grand on le respire et plus
on le respire plus encore
il grandit
nous aussi
plus on se sent petit plus on sait
qu’on est grand qu’on grandit
le soir tombe
à pic
et nous le relevons dans la lumière de la cuisine
avec le monde partagé sur la table une falaise encore
dans la bouche
un plongeon dans le oui de ta bouche
quand la chambre
envahit la cuisine

***

et l’air est large il nous pousse
à partir
de nous notre grain
emporté vers ce qu’on ne sait pas qui continue
la terre
rien n’arrête rien
la vie d’un geste une fois
commencée elle commence
pour toujours
si bien que chaque fois est le début démultiplié de sa propre éternité
et si bien que chaque éternité invente ses débutants
et plus il y a de vies plus il y a d’éternités qui commencent
nombreuses et quand on part au large
il y a plus d’ombres qu’on croit
qui se mettent en marche plus d’air
qu’on pense
dans ce qu’on apprend
à connaître ce qu’on commence
à parler je nage
la brasse mes mains
vers ton île de sein

***

jusqu’ici l’odeur d’iode nous tient
éveillés
une lampe se balance avec le petit vent de vivre au-dessus de notre table
sur la route entre audierne et douarnenez le vent tourne la lumière
du bout des doigts on continue de la lire nos ombres
creusent de la nuit des sourires sur la nappe des bouches dans les murs des rues
pour que le monde se réfugie pendant la pluie

puis il repart buée

à la pointe du raz le fond de l’air
est frais entre nous pointe
l’ile de sein dans nos bras nos corps noués on s’étonne
qu’ils nous aillent si bien

Philippe Païni

2 commentaires:

Anonyme a dit…

bonjour
puisque tu aimes les mots je t'invite à venir partager tes ecrits avec nous sur www.palmiereveur.forumparfait.com un site sympa qui regroupe des poètes formidables des 4 coins de la planete
Amities!

La rédaction et l'éditeur a dit…

Philippe répondra s'il en a envie, pour ce qui me concerne:
merci pour les palmiers! le poème "rêveur" ou le rêve du poème a-t-il besoin d'exotisme? je ne le crois pas, je pense même qu'il doit aller à contre-exotisme (voir Segalen et surtout Michaux) ; quant aux 4 coins: c'est une trop petite diversité... et quant aux cénacles de poètes formidables, s'ils célèbrent forcément la poésie, ce ne sont pas toujours les lieux où se trouvent des poèmes. C'est que je cherche avec Résonance générale.
Sympathiquement,
Serge Ritman